Je suis invité par Pato au sud de Santiago, à Villa Francia, quartier populaire s’il en est. Les habitants ont décidé de créer un carnaval totalement autogéré. J’y vais d’autant plus ravi que Subverso est annoncé en fin de soirée. 3 ans que je le manque, ce soir, c’est LE soir. Mais j’y vais surtout parce que les camarades Saïd et Juanito vont y jouer avec leur projet Sidi Wacho.
Je me rends donc en bus dans ce haut lieu de résistance à la dictature. Je n’ai pas pris mon appareil photo, les carnavals me gonflent, je n’y vais que pour les concerts. En arrivant je rencontre un groupe de grapheurs qui ont créé un mural en l’honneur d’un jeune homme assassiné à l’endroit de l’œuvre. Un combattant du FPMR (Front Patriotique Manuel Rodriguez). Un truc vraiment impressionnant. Je comprends plus tard que ce mural fait entièrement partie de la fête. Un des grapheurs, en apprenant ma nationalité, me raconte que Villa Francia se nomme ainsi en remerciement à la France. Qu’ouïe-je ? « Qu’est-ce que la patrie des droits de l’homme a à voir là-dedans ? Lui demande-je in petto, on n’en a pas fait assez en vous envoyant Aussaresses ? » « Que nenni, me répond-il, au contraire vous nous fûtes d’une aide précieuse. » Et de me raconter la chose suivante : Pinochet avait décidé de bombarder ce quartier très pauvre de la capitale chilienne. Pauvre et donc rempli de pourritures communistes. Les familles avaient beau exhiber les enfants portés à bout de bras pour faire changer d’avis les bidasses militaires, pour leur montrer que ce n’était pas un repaire de terroristes, ceux-ci ne voulaient rien entendre. Et tous ces gens ne doivent leur salut qu’à la pression de la France pour empêcher le carnage. Ce quartier porte le nom de Villa Francia en cet honneur. « Tu peux être fier de ton pays ». Ce serait bien la première fois ! Je laisse donc ce pauvre hère à ses délires éthylico-n’importe-quoi.
J’arrive sur le lieu même de la fiesta et là je dois dire que ce carnaval fût un enchantement. Rien à voir avec ces conneries bourgeoises vides de sens que l’on inflige à nos têtes blondes sous le seul prétexte de pouvoir se la coller avant, pendant et après. Je sais qu’un vieil édit stipule que pendant le carnaval de Dunkerque on peut tromper sa femme, ce qui se passe pendant le carnaval reste au carnaval. Qu’à Venise on se met des masques à la con pour entrer dans les back rooms. Qu’on profite du carnaval de Rio pour se mettre des plumes dans le fondement. Mais où est la subversion bordel ! Non ici on « carnavale » pour lutter. Ensemble. Contre l’état. Contre la misère. Contre l’oubli. Ici on s’autogère, on arbore des slogans révolutionnaires, on demande la justice et la vérité, ou dans l’autre sens… Dans une ambiance ! Un vieux camarade, disparu trop tôt cette année (Serges, si tu m’entends, c’est que soit tu n’es pas mort, soit que dieu existe – je ne m’emmerderai pas à lui mettre une majuscule, vu l’état du monde, il ne mérite pas – mais toi et moi savons que de toutes façons tu ne m’écoute plus) un vieux camarade, donc, me disait toujours, lutter oui, mais de manière festive. Et ben autant vous dire que même si la teuf était sans alcool et sans drogue, ça balançait grave, comme on a dû le dire pendant un moment. Perso je ne m’en souviens plus mais j’ai bon espoir de toucher des personnes âgées, alors je me plie volontiers à ce genre de formule par trop désuètes. Des batouk’ en veux-tu en voilà. Des groupes de musique à foison. Des trucs chinoisant. Plein. Mais de haute qualité. Beaucoup de couleurs, de costumes Aymaras, de drapeaux Mapuches, Palestiniens…
Le concert commence par les potos. Et non les potos. J’ai déjà parlé de la différence entre ce mot en français et en castillan. Démerde-toi. Donc Saïd, Juanito et leurs comparses font leur show et franchement c’est super. Ambiance géniale dans le public. Passe ensuite le Trio Memorial. Ils arrivent à 8 sur scène ! C’est quoi cette affaire ? Ils ne savent pas compter ? Je me dis : « tiens, le chanteur guitariste qui a l’air d’être le leader est aveugle. Ils lui ont fait une blague à l’Amadou et Mariam santiaguinote. Le dimanche à Santiago c’est le jour des gros pipos. » « Mais non, me répond l’amie Claudia, trio pour Nosotros, Ustedes y la Memoria (Nous, Vous et la mémoire) ». Un spectacle entièrement basé sur la recherche de justice pour les morts et disparus de la dictature. Un moment intense, pendant lequel une des protagonistes nous a raconté une histoire. Ce n’est pas pour te plomber ami lecteur, mais je l’ai trouvé tellement belle que je m’en vais à mon tour te la conter.
Pendant les dictatures sud-américaines, il était interdit aux prisonniers politiques de chanter, de se parler, d’écrire – même sur les murs. Il leur était même interdit de dessiner. Dans une de ces dictatures, un homme, brisé par de longues séances de torture, eut enfin la permission de voir sa famille. Une fois par semaine. Sa femme et sa fille, très jeune, se préparèrent à cette rencontre tant désirée. La jeune fille dessinât toute la journée de la veille. Arrivée à la prison, après les palpations d’usage, elle montrât son papier plié en deux au gendarme (NB : au Chili la Gendarmerie n’est pas le corps militaire qui tue des jeunes à Sivens mais l’administration pénitentiaire). Celui-ci l’ouvrit et découvrit un très joli dessin d’oiseau. Le gendarme déchirât le dessin et le jetât à la poubelle. La jeune fille regardât sa maman dans les yeux, cherchant une explication à ce qui venait de se passer et celle-ci lui dit : « nous sommes dans un pays où il est interdit de dessiner les oiseaux ». La petite comprit ce que sa maman voulait dire. La semaine suivante, la veille de la nouvelle rencontre avec son père, elle dessinât toute la journée. En arrivant devant le gendarme, elle lui donnât sa feuille pliée en deux, l’homme l’ouvrit et découvrit un magnifique dessin de papillon. Il déchirât le dessin et le jetât à la poubelle. La petite fille se tournât vers sa mère et d’un regard lui demandât une explication sur ce qui venait de se passer. « Nous sommes dans un pays où il est interdit de dessiner un être vivant. On ne peut pas dessiner un oiseau, un papillon, un enfant, une femme enceinte… ». La petite comprit ce que sa maman voulait dire. La semaine suivante, la veille de revoir son père, elle dessinât toute la journée. Arrivant devant le gendarme, elle lui tendit son bout de papier qui une fois déplié offrait au regard un très bel arbre. Cette fois le gendarme la laissât passer et elle pût offrir son présent à son père.
– Quel bel arbre, lui dit-il, mais que sont ces petites taches de couleur ? Des oranges ? Des prunes ?
– Non, des yeux.
– Des yeux ?
– Oui, les yeux des oiseaux qui se cachent dans les branches pour…
C’est à ce moment précis que j’ai été pris d’une quinte de toux, je n’ai pas entendu la chute. Mais convenons-en, ça avait l’air drôlement chouette. Non ? Bon, tant pis.
Il se murmure au Chili des choses bien étranges. Au pays du Pastel de Choclo, sorte de hachis Parmentier local, un homme a percé de secret du Pastel parfait. « Comment ? On a trouvé le secret du Pastel parfait ? » Entend-on dans les faubourgs de la capitale. « Mais qui est cet homme ? » ou encore « Il parait qu’il vient d’un autre monde ». Et bien humblement ami lecteur, je l’avoue je le confesse, cet homme venu d’un autre monde et qui a trouvé le secret du Pastel de Choclo parfait, cet homme c’est moi.
Approuvé par un panel impartial constitué de ma famille et de mes amis fortement alcoolisés (alcoolisés : les amis, pour la famille je ne me souviens plus), je me suis aventuré à, de tête, en faire un ici, au Chili, au milieu d’un public hostile de chiliens bien décidé à se rire de ce breton prétentieux qui osait marcher sur leurs plates-bandes culinaires. Et bien s’ils ont ri, ils ne l’ont pas fait longtemps ces bouffeurs de maïs ! Un succès total et une faillite morale de tout un peuple. Et depuis mon nom est scandé par toutes les ménagères du pays, entre effarement et adulation. « Tío Gus, Tío Gus ». Que d’émotion.
Et comme mon sens du partage n’a d’égale que mon mépris des pieds d’Estal, je me fais un plaisir ainsi qu’un devoir de donner à un public incrédule, la recette si simple de ce plat qui enchante mes hivers et fatigue mes intestins.
Donc pour ce mets dont la finesse n’est pas la qualité première tu auras besoin de :
– 6/7 grands épis de maïs frais (1 kg 1/2 de maïs en boite)
– 350 g de viande de bœuf hachée
– 2 blancs de poulet
– 3 beaux oignons
– 3 gousses d’ail
– 4 œufs
– 25/30 cl de lait
– de la farine de maïs
– une bonne grosse poignée d’olives noires
– avec ton autre main une autre bonne grosse poignée de raisins secs
– du beurre
– du cumin en poudre
– du basilic
– du sel et du poivre
– du sucre en poudre
Tu te lèves, tu vas à ton frigo, tu mélanges ton bœuf haché avec l’ail et 3 ou 4 cuillères de cumin (3 c’est bien, 4 c’est pour la gourmandise). Tu ajoutes du sel et du poivre, tu mets tes raisins à gonfler dans un bol de flotte et tu retournes dormir.
Après une bonne sieste réparatrice de 4 ou 5 heures, tu retournes à ta cuisine et tu t’occupes de tes oignons. Tout en continuant à suivre cette recette. Donc tu les coupes en dés et tu les mets dans une grosse casserole dans laquelle tu vas les faire revenir au beurre, pas à l’huile, on n’est pas des animaux. Et quand je dis beurre, je pense évidemment à « beurre salé ». Mais n’étant pas familiarisé avec le pléonasme, je dis « beurre », tout court. Pendant que ça dore tu fais 3 œufs durs. Pour le minutage de la cuisson des œufs tu te démerdes, je ne suis pas Ginette Mathiot ! Quand les oignons commencent à dorer, tu mets le bœuf qui a bien macéré et tu fais revenir tranquille. Tu fais cuire ton poulet à la poêle séparément.
A ce stade de la recette, il convient de retourner au lit ou de se verser une bonne rasade d‘Escudo. Mais puisque le public pléthorique qui me lit vit principalement en France, on peut remplacer l’Escudo par n’importe quelle bière de soif bon marché. Attention : il ne faut pas qu’elle soit trop lourde, on a encore du taf.
Tu prends tes choclos (ton maïs) et soit tu les cuits et les dépiautes s’ils sont en épis soit tu ouvres tes boites (comme je te comprends si tu opte pour la solution de facilité !). Dans les 2 cas tu mets le maïs dans une grande casserole (1,2 kg ça fait du volume) tu mets ton basilic (à convenance, moi j’aime ça donc je mets un demi bouquet) et le lait. Tu mixe le tout, tu fais chauffer un peu, tu épaissis avec 1 ou 2 cuillères de farine de maïs (si tu ne trouves pas tu prends de la maïzena, ça marche aussi), tu sales et mélange bien avec le dernier œuf, direct dedans.
A ce stade de la recette, il convient de se verser une bonne rasade de pisco. Mais puisque le public pléthorique qui me lit vit principalement en France, on peut remplacer le pisco par un bon whisky, bière, anisette, un Fernet Branca… Attention : il ne faut pas en abuser, l’opération la plus délicate arrive.
Dans un plat beurré (je ne reviens pas sur « au sel ou pas ») tu mets au fonds, par couche et dans l’ordre : le bœuf, la volaille, les œufs durs coupés en fines lamelles, les poignées de raisins (que tu as au préalable égouttés, je ne comprends pas comment tu n’y as pas pensé tout seul ! je ne vais pas te tenir la main jusqu’au bout quand même !) et d’olives, et par-dessus, la bouillie de maïs. Juste avant d’enfourner tu saupoudre de sucre. Une fois que tu as saupoudré de sucre tu enfournes. Dans un four bien chaud pour une bonne demi-heure. Il faut que le pastel soit bien doré au-dessus. Tu sers bien chaud avec une salade. Normalement tu fais manger 6 à 8 personnes.
Voilà. Tout ce tintouin pour un truc aussi simple. Allez bon appétit quand même.
J’ai piqué cette photo sur je ne sais plus quel site. Mais dès que je photographie le miens je met à jour.
On va à Viña, on va à Viña
Se faire griller nos petites guiboles
On va à Viña, on va à Viña
Se faire masser nos vieilles peaux molles
[…]
Viña ville de vieux, ou des cadavres blêmes
Gisent dans les rues farcis de chrysanthèmes
Viña ville de bourges, ou des enfants obèses
Se gavent de glucose dans de trop longues chaises
[…]
On va à Viña, on va à Viña
Se faire griller nos petites guiboles
On va à Viña, on va à Viña
Se faire masser nos veilles peaux molles
On va à Viña, on va à Viña
Dans la mer on va patauger
On va à Viña, on va à Viña
Et sur le sable on ira s’échouer
Les plus cultivés d’entre vous auront bien entendu découvert le délicat subterfuge qui m’a fait ré écrire ce tube international en remplaçant le mot Cannes par Viña (sous-entendu del Mar) dans cette chanson de 1990 qui berça naguère les rêves de l’enfant innocent et plein d’une douce candeur que j’étais et qui de questionnement en questionnement commençait à saisir avec une certaine appréhension les affres de ce monde brutal mais plein de paillettes qu’est la Croisette. Les VRP ne m’en voudront pas de ce brillant détournement tant il est vrai que Viña del Mar c’est la promenade des Anglais version Chili. Viña, c’est la difficulté de trouver une bière bon marché, ce sont les peaux rougies par trop de soleil. Comme Cannes ou Nice, ce sont les visages délicatement charcutés à la scie sauteuse de ces vieilles bourgeoises pour qui le mot labeur désigne une jeune fille d’origine maghrébine ; les corps délicieusement galbés de ces hommes virils mais corrects, qui se servent de la bibliothèque familiale pour faire du culturisme. Le Viñamarino connaît les mêmes difficultés que l’Azuréen à trouver une table libre au moment de la sortie des plages. La même peine lorsque par malchance il ne reste plus de crabe au menu. Et on se sent égoïstement heureux de laisser ces pauvres hères emperlousés à leur sort de va-nu-pieds mondain.
Viña, en trois syllabes : c’est à chier.
C’est donc avec soulagement que l’on retourne à Valparaiso où nous avons la chance de manger un excellent poisson frit, pêché fraîchement par un des derniers Mohicans de la pêche artisanale chilienne. Car ici l’esprit créatif du libéralisme n’a pas de limites. Et l’on observe avec admiration les premiers effets d’une loi sur la pêche passée en force sous la droite mais votée par la gauche qui – c’est étonnant – une fois au pouvoir se désole de l’iniquité de la mesure ! Par cette loi, achetée à coup de millions de pots de vin à l’ensemble de la classe politique, sept grands industriels ont pu s’attribuer la totalité du domaine maritime chilien. Tout simplement. Imaginez si la France qui est en passe d’obtenir des territoires suffisamment grand pour en faire le premier domaine maritime du monde en faisait autant ? Si Macron et Vals allaient au fonds des choses ? S’ils en avaient un peu dans le bennard ?
L’horreur !
Un peu partout sur le littoral les pancartes fleurissent pour expliquer aux chiliens, qui n’en ont rien à carrer, ce que sont les effets de cette loi. En fait ils doivent, au choix, travailler pour les flottes Intermarché locales, qui leur rachète le poisson au prix fixé par l’entreprise (et ça vole pas bien haut) soit acheter un droit de pêche à la dite entreprise. Droit de pêche très élevé bien entendu et qui empêche une bonne partie des artisans pêcheur de prendre la mer. Et là où l’on frôle le génie c’est que sur ces petites bandes réservées aux pêchoux, la capture de certains poissons est interdite sous prétexte de raréfaction de la ressource halieutique, mais que cette restriction ne s’applique pas à ces grands groupes qui peuvent de fait s’accaparer les richesses en voie de disparition de la côte chilienne. Brillant. Je reprend deux fois du congre.
Après cette leçon de réalisme économique et un débat fort instructif sur l’avantage de casser les jambes de quelqu’un qui use du mot « Province » juste pour se défouler ; après un passage long mais fabuleux par la Isla Negra, la maison de Pablo Neruda ; après avoir contourné des monceaux d’épaves humaine dormant dans – au mieux – leur vomi, suite à un 31 décembre célébré en grande pompe (à bière) ; nous quittons enfin les rives du Pacifique. Retour à la capitale pour enfin se reposer de ces agapes.
Nous avons la chance d’être hébergés par Angelica et sa famille dans les hauteurs de Valparaiso pour le nouvel an. Et autant dire que nous lui en sommes reconnaissant tant il est difficile de trouver un hostal bon marché en cette période. Le nouvel an à Valpo (quand on est dans le coup on dit Valpo, d’autres disent Courche ou Valto, mais eux je les méprise par principe) est une institution. Au moins 1 million de personnes dans les rues ! Et un feu d’artifice de déglingo. En fait c’est 4 ou 5 feux coordonnés sur plusieurs communes de la baie de Valparaiso que l’on peut voir de chez Angelica. Viña del Mar, Concón… Toutes ces villes balnéaires brillent en même temps.Rien à voir avec les pétards à mèche de l’autoproclamée plus belle ville du monde. Et nous sommes d’autant plus reconnaissant qu’Angelica ne nous connait ni d’Eve ni d’Adam. Simplement, elle est une ex pressa et qu’elle connait parfaitement le sens du mot camaraderie. Je pense qu’à part les militants du Parti Socialiste tout le monde connait le mot « camaraderie », je ne vais donc pas l’expliquer ici, mais ils peuvent me le demander par courrier postal ou par télégraphe, je reste à leur disposition.
Nous arrivons donc la veille pour prendre nos quartiers, Pato, son amie Claudia, Myriam qui nous suit dans cette nouvelle aventure et Thomas le viking au teint d’albâtre et aux cheveux… d’une certaine couleur. Pour copier de manière éhontée Vincent Malone, je dirais que c’est un Viking aux cheveux de sa couleur. Je suis désolé de ce passage fort ennuyeux sur la couleur des tifs du camarade mais dans une précédente chronique, par mégarde ou par malveillance, je ne sais plus, j’ai dit du Gorillon de Paris qu’il était, comment dire, qu’il était roux ! Et sa maman qui n’a évidemment pas apprécié de voir écrit ce qu’elle n’ose s’avouer – on a autant envie de savoir que son fils est roux que d’apprendre qu’il est fan de Jean-François Copé ou qu’il désire être curé chez les enfants de troupe – sa mère donc à placé un contrat sur mon charmant minois. L’hexagone au sud de Lyon m’est interdit, ainsi qu’une partie un peu paumée de la France dont j’ai découvert avec stupéfaction qu’elle était proche de la Bretagne, la Normandie. Je n’ai pas plus envie d’aller à Cannes qu’au Havre mais on ne sait jamais, un accident étant vite arrivé, je demande solennellement pardon, je ferai acte de contrition et je ne dirai plus que mon camarade à la peau de lait mais au visage rougi par le soleil est un rouquin. Je le penserai fortement mais cela, Madame, vous ne pourrez me l’empêcher, j’ai ma liberté de penser !
Merci !
Et puisque l’on parle rouquins, parlons anglais. Oui les anglais. Pas ceux qui vont débarquer mais les autres, les citoyens de sa gracieuse majesté. Parce que dans le port de Valparaiso, où il y a également des marins qui chantent, on peut apercevoir deux ou trois bâtiment militaires de la glorieuse flotte Chilienne. Ces fabuleux vaisseaux ont été achetés aux Royaume-Unis, vous savez ce pays autrefois puissant mais qui depuis une certaine dame de fer est resté bloqué – un lumbago sans doute – la bouche ouverte – une crampe à coup sûr – sous le bureau de l’oncle Sam. Et bien figurez-vous que Madame de Fer avait une amitié particulière avec le Grandissime Pinochet. Un même gourou charismatique, prix Nobel d’économie, Milton Friedman, attisait entre eux le feu de la passion ultralibérale et les poussait légitimement à craindre, donc à combattre, la fange ouvrière qui détruisait les fondements de leurs pays respectifs. Il arriva un drame dans leur si belle idylle. Les gauchis’ ont viré Augusto du pouvoir qu’il avait gagné à la seule force de son travail et d’une armée gagnée à ses idéaux de stupre et d’ordre. En effet, lors d’un voyage en Grande Bretagne, un juge malveillant – ne serait-ce pas un pléonasme ? – demanda à coup de mandat d’arrêt international l’arrestation et l’extradition de ce saint homme vers l’Espagne, arguant du fait que le généralissime « aurait », on met bien les guillemets, « aurait » fait exécuter des citoyens espagnols. Quelle honte que de s’acharner sur un pauvre petit vieux !
On connait une partie de la suite. Il fut placé en résidence surveillée, Thatcher a gueulé, la famille d’Augusto a présenté Pinochet comme un vieillard malade et en fin de vie, ne pouvant se déplacer qu’en fauteuil roulant. On se remémore avec joie qu’au bout de plusieurs jours, semaines, de joutes judiciaires, le grabataire a eu le droit, venu directement de Downing Street, de rentrer mourir chez lui au Chili, entouré de sa famille. On se rappelle avec émotion comment il s’est levé de son fauteuil dès l’arrivée sur le tarmac de Santiago et comment il a commencé à marcher d’un pas alerte, l’œil vif et le poil soyeux, l’air de dire, face aux caméras du monde entier : je vous ai bien niqué !
Ce que beaucoup ignorent, les chiliens les premiers, c’est que rien ne s’est joué dans cette affaire sur le plan judiciaire, hélas pour le juge espagnol qui a vraiment travaillé dur dans cette histoire. Non, le niveau de négociation était directement à la tête des états chiliens et de la plus que bien nommée dans ce cas Perfide Albion. La présidence chilienne a obtenu de récupérer Pinochet en s’engageant à acheter quelques vaisseaux de la flotte royale dont Londres voulait se débarrasser. Le Général ne sera jamais jugé pour que le trésor britannique puisse se renflouer. Les chiliens n’auront jamais accès à la justice parce que tous les gouvernements successifs, de droite comme de gauche, ont toujours préservé, avec un acharnement qui force le respect, l’impunité des putschistes.
Et bonne année quand même !
Bon outre que ma lentille est dégueulasse, je tiens à souligner pour les blaireaux du fonds que le bateau au premier plan ne FAIT PAS partie de la transaction.
On serait bien couillon de se limiter !
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