Manif pour toutes et chiens sans punk


Ok c’est ma troisième arrivée à Santiago mais le plaisir reste le même. Le passage au-dessus de la cordillère est toujours aussi impressionnant, l’air toujours aussi chaud, les santiaguinotes toujours aussi belles, et le bonheur d’être aussi loin de vousla France toujours intact. Grosse nouveauté pour cette nouvelle édition, je suis accompagné par un camarade qui fait dangereusement chuter l’âge moyen de mon entourage sur place. Le mec n’a connu aucune guerre, aucun coup d’état, pas de torture ni d’exil… A part peut-être une jambe cassée après une soirée trop arrosée, il n’a rien vécu de terrible. Ses anecdotes ne remontent pas à plus de 8/10 ans ! Et en plus, il ne parle pas un mot d’espingouin ! En somme, un peu de franchouillardise pré pubère dans mes bagages pour un voyage qui s’annonce des plus roots. A commencer par le passage à la police des frontières. Alors que mon camarade a passé la formalité en quelques secondes, mon vis-à-vis n’avait visiblement pas l’intention de me laisser entrer sur son territoire aussi facilement. Plus de 25 minutes d’interrogatoire sur mes motifs de voyage, sur mes fréquentations en regardant page par page mon passeport pour bien vérifier que tout était en règle :
         – Pour quelles vraies raisons vous venez visiter le Chili ?
         – Ben pour mes vacances.
         – Il n’y a pas une autre raison ?
         – J’ai plein d’amis ici
         – Où ?
         – Ben ici à Santiago, à Temuco…
         – Comment ils s’appellent à Temuco ?…
25 putains de minutes de ça. Bon. Passons.
Nous sommes attendus par Pato et deux amis à lui qui vont nous servir d’abord de chauffeurs puis d’hôtes. Jorge et sa compagne. Je donnerai son prénom quand je saurai l’écrire. Jorge est un indien Pueblo qui est né et vit au Chili, ancien résistant à Pinochet (jusqu’à son départ de la présidence), combattant de l’ombre, formé au maniement des armes et des chevaux ! La classe ! Il a planqué des réfugiés d’autres dictatures et des guns. Féministe, internationaliste, militant hasta la muerte… Ne cherchez pas à lire entre les lignes, ce mec me plait. Et lui et sa compagne (je ne sais toujours pas écrire son prénom, un peu de patience) semblent également plaire à mon compagnon de route, qui pour sa première en terres australes, aura eu droit à un accueil de ministre. Au petit soin qu’ils sont avec nous. Bonne bouffe, bon pinard et pour finir, le pisco sourqui va bien. Avec en plus une petite bouffarde de beu, qu’ils font pousser dans leur jardin pour en faire une huile de massage (véridique)… J’avoue qu’après plus de 3 ans sans avoir fumé quoi que ce soit, l’idée de ces quelques lattes de puras ne m’enchantait guerre. Mais l’insistance du poto et le manque de volonté du trèèèès certainement au décalage horaire tout ça tout ça, j’ai craqué. Et bien tant mieux. Je me suis en dormi comme… Comme une merde. C’est ça. Comme une merde. Mais Bon Dieu que c’était bon !
Après cette belle nuit réparatrice pendant laquelle le niveau sonore dû à nos ronflements devait atteindre des sommets façon concert de Pig Destroyer ou de One Direction (j’en tremble encore !), nous priment le temps de bien nous reposer, de bien manger, de boire correctement avant la première manifestation du périple. Et pour cette première, on est bien gâtés. Une manifestation contre les violences faites aux femmes. Chouette. On va être 10 mais on va être bien. Oulala que j’ai hâte. Bon on va se faire chier mais on aura bonne conscience. Pour passer le temps on pense à cette bonne vielle vanne améliorée par Larcenet et Lindingre :
         – Frappe ta femme, si tu sais pas pourquoi, elle, elle saura.
         – Ben moi ma femme est parti y’a 10 ans.
         – Ben pourquoi ?
         – Parce que je la frappai.
         – Ben pourquoi ?
         – Je sais pas, elle me l’a jamais dit.
J’en ris encore. Mais quelle couillon je suis. Énorme cette manif. Un cortège impressionnant. Jeunes vieux, hommes, femmes, enfants. Incroyable. Des drapeaux rouges, noirs, verts, violets. Les jeunesses de ci, les vielles de ça, et les Pan y Rosas (littéralement pain et roses ? va falloir que je me renseigne sur ce groupuscule !). Le cortège est accompagné par des dizaines de chiens des rues qui ont l’air de trouver ça cool. C’est ça la vraie libération animale. Nous on a des punks à chien, ici il y a des chiens sans punk. Respect.
Pendant la manif et au vu de certains slogans décrivant une situation terrible sur le droit des femmes au Chili, je ne peux m’empêcher de penser à la Manif pour Tous. Et je chantonne pour moi-même : « Manif pour tous dans ton cul, manif pour tous dans ta ch… » Les assidus du Hellfest connaissent.



Après la manif nous prenons une bière en terrasse. Nous sommes entourés de 9 nanas survoltés mais bien sympathiques. Pendant que Pato fait le joli cœur (ces demoi… ces dames sont charmantes mais mon pote et moi ne pratiquons pas la gérontophilie), une de ces donzelles nous parle du pourquoi de l’ampleur de la manif. Le 21 novembre, il y a 5 jours,  María Olguín Barraza, 30 ans, est morte sous les coups de son compagnon. Elle est la 51e chilienne cette année. 
Du pain et des roses. Le slogan féministe le plus con (quel humour) de l’histoire !

Chien sans punk précédent une asso !

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