Ras-le-bol de ce pays. Je crois que je n’y suis plus le bienvenu. L’ai-je vraiment été ? Il y avait des indices pourtant, mais je n’ai pas su les voir. Et aujourd’hui… Diantre, j’enrage.
Le premier jour de mon arrivée, Pato m’invite à la Legua où il répète une de ses pièces de théâtre avec une troupe amateur. Un brûlot hippie sur une île qui représenterait tout ce que le monde n’est pas. Soit disant que les pays riches appauvrissent les pays du sud en leur volant leurs richesses, et que je te pollue, et que le plastique c’est pas fantastique, que Tío Samil est pas gentil, et que c’est pas gentil d’être méchant, que le nucléaire c’est caca, la guerre c’est mal et heureusement qu’il reste des bons sauvages qui savent bien, eux, que la Terre est vivante et que c’est grâce à leurs savoirs ancestraux qu’on va s’en sortir et gnagnagna et gnagnagna… Je ne fais pas vraiment attention à ce qui se passe et se dit tant un gosse insupportable (pléonasme, je sais) m’empêche de me concentrer. Il n’arrête pas de jouer sur son i-phoune, son à fond, ou alors il pousse des cris bizarres. Je passe l’heure à me demander s’il n’est pas complètement con ou taré ou les deux. Mais si j’avais été plus attentif, j’aurais bien sûr remarqué que cette pièce sent l’anti-France à plein nez.
La suite se passe plutôt bien. Je me sens presque chez moi. Politiquement nos deux sociétés se ressemblent, ils ont une droite qui vient directement de la junte, la notre se rapproche de Marine ; ils ont une haine féroce des envahisseurs boliviens et dominicains, nous on a des maghrébins et des roms qui mangent notre pain ; ils ont une gauche la plus conne du monde avec un PS empereur, ben nous pareil. Chiloé ressemble à la Bretagne, Viña del Mar à St-Tropez ; les santiaguinotes sont aussi bourrins dans le métro que les parisiens dans le leur… À noter tout de même une grande différence entre les comportements suburbains de ces deux villes : ce qui frappe ici c’est que même si les gens n’attendent pas que tout le monde descende pour rentrer en force dans la rame, on garde le sourire. Alors qu’un parigot préférera se coincer les balloches dans la fermeture éclaire de son futal plutôt que d’avoir l’air content, et ce, même si la rame est vide. Comme le disait la pub, « le parisien il vaut mieux l’avoir en journal ». Et moi je rajoute, « oui mais à la rubrique nécrologique ».
Vendredi, une première alerte. Je n’y prends garde, les esprits sont échauffés par… rien de spécial. Soirée sans alcool, repas tranquille. Chez Celsio, au sud de Santiago. Je me prends une première réflexion de sa sœur. J’aurais du être plus vigilant ; c’est que c’est fourbe ces trucs-la. Mais je laisse couler. Elle ne sait pas ce qu’elle dit. Et puis dimanche, la triste vérité.
Visite du Cementerio General de Santiago, un truc énorme qui ferait passer le Père-Lachaise pour le jardin potager de mon nouveau pote Pavel, anarco-vegan qui cultive ses légumes avec 2-3 pieds d’herbe parce que « faut pas déconner, vus les prix du marché ! ». On se rend devant le mausolée d’Allende, puis sur la tombe de Victor Jara et devant la stèle de Miguel Enríquez avant de finir par le mur des disparus et assassinés de la dictature. Moment encore difficile pour Pato. Le camarade Celsio refuse de nous accompagner. Lui ne peut toujours pas. Après la balade, nous nous retrouvons chez un des oncles de Carolina. Jaime. Il y a du monde, nous devisons de tout et de rien mais surtout de bouffe (sujet de prédilection ici) et tout à coup : paf ! Le paré à virer dans ma ganache. « Vous êtes des barbares machistes ! ». Presque mot pour mot les propos de la frangine de Celsio ! À deux jours d’intervalle ! Une cousine de Carolina me sort ça en lisant ma carte de visite. Nous, la France, ce phare de l’humanité dans les ténèbres de l’ignorance. Un pays de barbares machistes ! Tout ça parce que je ne porte que le nom de mon géniteur alors qu’ici on a celui du père ET de la mère. J’ai beau arguer que, oui, c’est vrai, qu’en France on se passe bien volontiers du superflu, que de toutes façons, ça les regarde pas et que depuis quelques années, le laxisme post soixante-huitard aidant, une famille peut s’abaisser à donner le nom du père et/ou de la mère, rien n’y fait.
– Et au collège ? Comment on se présente ?
– Ben comme sur mon état civil ou sur ma carte d’identité. Je suis le fils de mon père. LE chef de famille. D’ailleurs on ne dit jamais LA chef de famille. C’est bien que ça n’existe pas.
– Pauvres femmes ! Et une femme qui se marie, elle perd son nom ?
– Normalement oui. Elle peut s’enorgueillir de ne faire plus qu’un avec son maître son époux. Mais à cause de soixante-huit tout ça… Maintenant elle peut garder son nom.
– Pauvres femmes !
Ça, elle l’avait déjà dit. Donc, devant la pauvreté de son argumentation, j’ai mis fin aussi rapidement que possible à cette discussion. Ah, le choc des cultures. Ils ne sont pas encore prêts à recevoir la lumière. ¡ Que pena ! Mais entre ce cagage de pendule pour une histoire de nom et cette pièce de hippies, décidément, je crois que je ne suis plus le bienvenu…
Pour les morts aussi c’est noël.
Pétain était un boche? Tout s’explique !
Fin de la trêve hivernale et début des expulsions…
Un petit parasol, les morts aussi ont droit à un peu d’ombre.
Je pensais vous parler de la journée internationale des droits de l’homme. Mais comme ce 10 décembre c’est aussi le huitième anniversaire de la mort de Pinochet (coïncidence des plus troublantes) et que les députés de droite se sont levé dans l’assemblée pour observer une minute de silence à la mémoire de ce grand homme, j’ai plutôt envie de vous parler d’un truc radicale pour oublier la connerie humaine…
Pour ce deuxième voyage au Chili, je m’étais promis de :
–me les geler miches à Puerto Edén (ce sera chose faite en janvier)
–me cramer les pinceaux à Iquique (voyage la semaine prochaine)
–goûter un Mote con Huesillo (fait la semaine dernière)
–découvrir le terrible Terremoto
Pour cette dernière volonté, je ne parle pas d’un vrai tremblement de terre, version 9° sur l’échelle qui va bien. Pas ce truc tout juste bon à réveiller un insomniaque et qui fait toujours la une des journaux en Bretagne. « Houlalala, on a eu chaud. 2,5° sur l’escabeau de richter… quelle aventure ! »
Non, je parle de ce cocktail chilien qui ravage les neurones, rend les jambes molles et donne l’impression d’être sur le pont avant d’un rafiot par force 25. Ici on dit qu’on en boit deux maximum. Allez, 3 si on est en forme. Après on ne répond plus de rien.
Il y a quelques jours nous sommes invités à la fête qui suit le baptême d’un neveu de Carolina. On me propose un verre de cette boisson. « Super », dis-je tout de go, « je vais enfin goûter à ce breuvage ». « Mais enfin weon, tu connais déjà » on me rétorque en riant. « Souviens-toi l’année dernière ». Tout de suite ça fait film de série Z. Et effectivement lorsqu’on me tend le verre, je reconnais la chose. Et je frémis. Petit retour en arrière.
Lors du nouvel an dernier, nous avons été invités à Buin, dans la maison de vacances de la famille de Carolina pour y passer el año nuevo. Vers minuit, son père sort une grande jatte et y fait une tambouille à base de grenadine, d’un ersatz de champomy et de beaucoup de glace à l’ananas. Plus un autre truc que je ne vois pas. Comme je commençais à être fatigué par trop de voyages, de pisco et de vin rouge, je décidais sagement de passer à ce cocktail sans alcool. C’était pas mauvais. Un peu trop sucré à mon goût. Mais il n’y a pas d’eau sur la table alors… J’y retournais pour me servir à nouveau. Une fois. Deux fois. Trois fois. Quatre… Bon après, tout ce que je sais, c’est que je me suis réveillé 6/7 heures plus tard. Avec un mal de crâne à décorner une femme de président. On me dit que j’ai bu de ce truc toute la nuit, sans m’arrêter. Et que c’était marrant, que je parlais tout le temps. Même si au bout d’un moment, me comprendre était vraiment pas aisé, que quand j’étais boracho on pouvait trouver autant de purée dans ma bouche que dans celle de Booba agen (bon ici ils connaissent pas le gazier mais c’est l’idée). Intrigué de ce trou noir, je m’en vais vers les poubelles. En examinant les cadavres de la veille, je me suis rendu compte que ces bouteilles toutes colorées, avec plein de paillettes sur les étiquettes, étaient en fait des bouteilles de vin mousseux local et que l’ingrédient mystère, une grosse dose de pisco.
Voilà mesdames, messieurs, l’horrible vérité toute nue. Avec le terrible Terremoto, effectivement la terre tremble, mais pas tes neurones.
Le lieu du drame, un an après. Tout à l’air si tranquille, mais tout ne tient qu’à un fil…
Je suis plutôt matinal aujourd’hui. J’ai pour mission d’aller accueillir une célébrité à l’aéroport. Pato et Carolina s’engueulent à ce sujet. Un technicien pour internet doit passer nous rétablir le réseau (il ne viendra pas), Pato doit rester à l’attendre et Carolina pense que je vais me perdre. Ambiance. Mais bon, pas plus con qu’un autre, j’arrive à destination. Problème je ne connais ni l’heure ni le vol du camarade. Seule certitude, les arrivées d’Europe et d’Amérique (nord et sud) c’est entre 9h30 et midi. Y’a plus qu’à… La télévision est là qui attend l’arrivée de la star. Je me précipite vers l’entrée quand je vois le caméraman s’exciter. Il allume son projo et commence à filmer. Comme je ne suis pas grand (c’est un doux euphémisme) je ne vois pas la estrella approcher. Je m’apprête à gueuler son nom pour qu’il me voit mais juste à ce moment je croise le regard de l’objet de la convoitise journalistique. Une bimbo sur-refaite ! C’est pas mon pote. Merde alors. Y’a des gens plus connus que Saïd ici ? Les bras m’en tombent. Après plus de deux heures, je rebrousse chemin. J’apprendrai plus tard qu’on s’est loupé à 5/10 minutes. Et que le camarade était attendu par une vraie star chilienne chez qui il va loger pendant ce nouveau séjour. Juan Ayala. Leader d’un groupe nommé Juana Fé. Saïd m’invite le soir même à un concert du bonhomme. Un projet solo. J’y vais seul car Patricio doit répéter sa pièce de théâtre dans un centre culturel de la Legua. Je vous en parlerai plus tard, de ce torchon gauchisant. La soirée est parfaite. Un truc de déglingos, comme on dit chez les gens qui disent encore « déglingo ». Le concert à lieu dans l’amphithéâtre du Museo de las Bellas Artes – le musée des Beaux Arts. En première partie un groupe belge, Xamanek. Une fratrie (deux frères une sœur) d’origine chilienne accompagnée d’un percussionniste d’origine marocaine (mais profondément belge). Cette soirée est très spéciale pour eux. Et très émouvante. C’est la première fois en 21 ans qu’ils reviennent ici. Leur père a été assassiné par la junte en 1981. Ce sont des enfants de l’exil, comme ils disent. Ils ont pu enregistrer un nouvel album à Santiago et ils le présentent pour la première fois, avant de reprendre l’avion demain. Ils sont accompagnés de trois autres saltimbanques du coin. Très chouette moment. À l’entracte, Saïd et moi partons à la recherche d’une épicerie de nuit. On s’offre chacun une petite bouteille de pisco sour, qu’on sirote comme deux lascars dans la rue et qu’on fini dans la salle. Ici se faire pincer à picoler dehors coûte à peu près 100 euros d’amande. Mais on est des rebelles. Rien à foutre ! De la pure caillera. Wech gros. Truands de la galère en force… Le concert de Juan est excellent. Des cuivres, des guests… tout est pour le mieux. Sauf qu’il se termine après le dernier métro. Pas de bol, je vais être obligé de dire oui à l’invitation à l’after. Merde alors ! On monte donc dans une bagnole, un utilitaire, cinq derrière sur un matelas pour le confort et des puces pour ne pas squatter, et on arrive dans un lieu nommé la Maquineria. Grosse teuf, bonne ambiance, mais le pisco a eu raison de moi un peu vite. Plein de rencontres, de belles discussions, mais à 3h30/4 heures, je décide que mon taux d’alcool est largement suffisant. Je m’esquive et hèle un taxis. La fatigue (oui, la fatigue !) aidant je lui donne une mauvaise adresse. Après un détours d’au moins 20 mn, j’arrive finalement à bon port, sous la pluie et ruiné. ¡ Puta madre ! Il était temps. Je n’aurais pas aimé donner raison à Carolina. Ce week end, pas de papier. Lundi, c’est férié et trois jours de fêtes sont en vue à Buin, au sud est de Santiago. Nous allons squatter une maison de famille en pleine campagne, piscine, grillades, fruites de mers, cordillère en fonds visuel. Saïd, Juan et Mía – sa compagne, sociologue spécialisée dans les conflits paysans et du statut des femmes au Brésil – seront de la partie. Une occasion rêvée, dès mardi, de vous parler de ma rencontre avec cet excellent breuvage de fiesta qu’est le terrible Terremoto.
Quel beau t-shirt il a Saïd !
Saïd, Juan, Mia et Pato avant l’arrivée de la famille.
Le premier piaf que je vois. pas foutu de le photographier correctement pour Nico
Ce jeudi, nous sommes invités par el amigo « El Doctor » Alejandro à nous rendre dans un lieu bien singulier : La Casa de la Cultura. Un centre culturel en plein milieu de la Legua, ce grand barrio de Santiago connu ici pour sa grande pauvreté, sa violence et ses narcos. Bon la Legua c’est bien sur bien d’autres choses, mais les stéréotypes ont la vie dure. Alejandro me demande quand même de ne pas prendre de photos dehors. Pas par peur d’attirer l’attention d’un voleur quelconque qui me ferait les poches (le sac en l’occurrence). Non, plus pour ne pas qu’un narco puisse se sentir observé. Sont sensibles ces gens-là. Même s’ils sont protégés par les pacos du coin, corrompus jusqu’à l’os, ils ont un peu peur de tomber sur un journaliste ou un policier honnête. Sur ce dernier point, dans ce quartier, c’est vrai que ça serait VRAIMENT pas de bol !
Nous arrivons donc à pied au Centro Cultural. Pas de contrepèterie. C’est un lieu autogéré, qui ne veut pas être assimilé à la politique culturelle de la ville ni aucune autre. Le bâtiment appartient à un riche propriétaire qui en chie un peu pour récupérer son bien. Mais à chaque fois qu’il lance une procédure judiciaire, ça lui coûte du pognon et ça ne lui sert à rien car les camarades restent ou reviennent (selon les décisions de justice). Grande salle, belle cuisine, des bureaux… les gaziers ont organisé le lieu à leur sauce. Ils n’ont de comptes à rendre à personne et surtout pas à la mairie (communiste) de la Legua. On trouve ici une école libre et l’on y propose des ateliers divers et variés. Un vrai beau lieu militant au cœur du barrio.
Aujourd’hui, à l’occasion d’une manifestation culturelle, « América latina desde abajo » (que l’on pourrait traduire par Amérique latine vue d’en bas) le centre reçoit plusieurs auteurs et propose un moment de convivialité. Avec une heure de retard (comme le dis avec malice un camarade : au Chili on aime la ponctualité), une quarantaine de personnes profite d’un excellent repas offert avec les moyens du bord (mais quels moyens !) : salades en tout genres, à la mode chilienne, poisson frit, riz, le tout arrosé de jus de fruits maisons et surtout de borgoña, sorte de sangria locale. Du vin rouge pour le coeur, des fruits rouges pour la santé et des glaçons pour la fraîcheur. Comme pour le terrible Terremoto – dont la narration de la rencontre est encore reportée à demain sauf s’il me reste du temps – que du bon, mais faut pas en abuser, je sens que ça a vite fait de taper. Alejandro me parle de l’équivalent vin blanc de la borgoña : el ponche, fait avec des fruits comme l’abricot, l’ananas… Ça a l’air bien aussi. Bref…
Après cet excellent repas, on range les tables et on cause. Sujet du jour : l’autogestion en Amérique latine. Je mentirais si je disais avoir tout comprit. Mon niveau de castillan n’est pas encore au top et la chaleur écrasante (presque 30° à l’intérieur) m’a un peu assommé. Rien à voir avec un excès de borgoña ! Autour de la table, des gens de la Legua, un auteur argentin, deux uruguayens, un italien. La discussion est passionnante. Ce qui m’impressionne c’est que chaque orateur peut développer sa pensée sans risquer d’être coupé. Certains peuvent jacter plus de 10 mn sans être emmerdé. Une très grande écoute. Quand je pense à mes premières réunions d’Ingalañ où l’on pouvait être coupé au bout de 15 secondes ! Mais ça c’était avant.
Les idées fusent et l’on aborde tour à tour la main mise des multinationales, les luttes indigènes, la nécessité d’une assemblée constituante, ou pas, le besoin de s’organiser sans rien attendre des pouvoirs en place (et encore moins des communistes – ceux du parti – qui semblent particulièrement peu appréciés ici aux vus des retournements de veste de certains dirigeants une fois arrivés au pouvoir). Seul l’uruguayen me laisse circonspect. De bonnes idées le bougre mais quand il dit que les luttes sociales et environnementales sont tenues par les femmes et que sans elles pas de combat… On ne va quand même pas les féliciter de faire quelque chose de leurs journées, pendant qu’elles manifestent qui s’occupe des gosses ? Je sais c’est gratuit. J’ai moi-même constaté que la grande majorité des manifestations étaient organisées par des nanas. Elles sont sur tous les fronts. Bachelet avait promis des avancées en matière de droit des femmes, mais comme on dit, les promesses n’engagent…
On termine cette journée par le fafane, moment de communion, avec un cri qui fait à peu près : « yayayayayayayaaaaaaa » (le hurler très aigu). Normalement ça se fait deux fois, mais une des représentantes (mapuche) du lieu demande qu’on en fasse quatre, suivi d’un Marichiweu (dix fois nous vaincrons) des familles. Une bien belle journée, pleine de bonnes énergies. Mais demain : rencontre avec une autre star locale. Surprise…
La Casa de la Cultura
Pas de narcos en vue, on peut prendre UNE photo sans se faire dessus.
Spéciale dédicace à Jil qui aime à mettre l’Amérique Latine à l’envers
Santiago, 2 décembre. Aux environs de midi heure locale.
Température extérieure : 34°. Ressentie : 50°.
Rendez-vous avec Celsio. Un vieil ami de Pato. L’objectif : aller ensemble à l’ambassade d’Autriche. Un amour commun des pantalons de peau à bretelles et des petits chapeaux à plume nous pousse à nous rendre sous un soleil de plomb aux bureaux de la délégation teutonne afin de rendre un vibrant hommage à ce peuple qui a offert au monde les valses les plus sirupeuses et ainsi rendue possible la célébrité d’André Rieu. Ça et une action de militants écolos venus en ce lieu pour faire le maximum de bruit. Et je dois bien avouer que le rapport nombre de participants/niveau sonore est des plus impressionnants. Un bruit incessant dû à l’utilisation de bouteilles d’eau vides (le détail a son importance) et la répétition de refrains criés à tu-tête fait rapidement mal au crâne. Mais c’est marrant. Cette action préfigure une manifestation d’importance le 13 de ce mois. Dans le viseur de ces dangereux ennemis du progrès, le projet hydroélectrique d’Alto Maipo. Je l’avais déjà évoqué rapidement lors de mon précédent voyage, mais il semble que les choses se précisent. Avec une actualité assez amusante en plus. Voilà le topo. L’idée est de construire deux centrales hydroélectriques, alimentées par la captation des eaux des affluents du Río Maipo qui fournit 80% de l’eau potable de la région de Santiago. Et pour ce faire il va falloir mettre dans 70 km de tuyaux les Ríos Volcán, Yesoet Colorado et défigurer ainsi ce site naturel. Il se trouve que l’entreprise chargée du projet est autrichienne. D’où notre présence.Bon, rien de nouveau sous le soleil me direz-vous, une grosse boîte pour se faire de l’oseille va poly violer Mère Nature avec l’assentiment d’un pays dit civilisé. Oui mais là où l’histoire prend tout son sel c’est quand on apprend que l’électricité fournie par ces centrales doit aller direct au nord du Chili, pour faire tourner des mines qui appartiennent à la famille Luksic. Un milliardaire d’origine croate qui a fait fortune en découvrant une mine d’or. Et ce monsieur vient de s’illustrer en offrant devant les caméras de toutes les chaînes nationales 2.500.000.000 de pesos (3.304.062,68 euros) à l’écoeurant Teletón. Ce chanceux cynique a fait d’une pierre deux coups : il s’exonère d’impôts et il fait chialer la ménagère pour qu’elle soit plus compréhensive. Elle n’aura plus d’eau potable et un des plus beaux sites naturels du coin va être détruit, mais « les petits myopathes avaient l’air tellement content ! »
Après cette entrée en matière gauchiste, un bref passage par la Vega Central (un marché couvert) où nous déjeunons dans un petit bouiboui fort sympathique, le Karlita. Je recommande. Pescacito con arroz y ensalada. Traduction, poisson panné riz et salade. C’est moins glamour. Mais c’était vraiment bon, pas cher et en plus les serveuses (boliviennes et charmantes) n’arrêtent pas de t’appeler « mí amor », ça a son charme.
Petite visite du quartier Patronato, le quartier palestinien (une des plus grandes communautés de la diaspora palestinienne au monde) et nous arrivons à la Casa del Sol. Dans ce superbe lieu, mes deux compagnons me présentent Amaro Labra, le chanteur auteur compositeur d’un groupe mythique au Chili : Sol y Lluvia. Ils viennent de fêter leurs 35 ans de carrière. J’ai eu plaisir à les voir sur scène l’année dernière et nous les reverrons dans quelques jours. J’adore ce groupe pour ce qu’il représente. Ils ont commencé sous la dictature, ont chanté sous et contre la dictature et même si Amaro m’avoue qu’en 88, profitant d’une tournée au Canada ils se sont tâtés pour s’exiler, ils sont revenu (un en prétextant que sa femme et ses gosses l’attendaient – j’ai pas bien compris en quoi c’était une bonne raison – et les autres après la victoire du No lors du référendum, pas folle la guêpe). Rien à voir avec ces branleurs qui fuient la dictature socialo communiste française pour payer moins d’impôts ! Ces mecs ont chanté des horreurs sur Pinochet PENDANT la dictature (AdiosGeneral). Et ils sont encore là. Ce qui me fait dire que, bon, c’est vrai que les militaires sont un peu soupe au lait. On ne va pas le nier. Mais c’est bien la preuve qu’ils peuvent être compréhensif et mélomane. Un bon massacre pour tuer le temps, un viol collectif pour se lâcher et ça y est. On est plus enclin à se montrer magnanime et attentif. Ce sont de grands enfants après tout. Comme le disait fort à propos Desproges en son temps : « dans Pinochet il y a hochet ».
Amaro me fait visiter les lieux et franchement ça me plait. Sur trois étages, on trouve des salles de classe ; des ateliers de : mosaïque, yoga, pilates, ballet, origami, dessin, gravure, faïence ; un restaurant salon de thé avec une carte des plus attirantes (y’a même du végétarien) ; une salle de spectacle, une autre de conférence. De quoi accueillir des artistes en résidence, les exposer, les faire jouer, répéter… Et même de quoi les aider à assurer une bonne promotion. Le tout administré collectivement. Je suis sous le charme. De plus je sais par les deux lascars qui m’accompagnent que Amaro met une grosse part de ses cachets dans ce projet. Il redistribue presque tout. Classieux ! Au retour nous faisons halte Plaza de Armas afin que je connaisse enfin le Mote con Huesillo, une curiosité à base de fruits séchés au soleil (ici des pêches), réhydratés dans un sirop et dans lequel on rajoute du blé. C’est frais et par ces chaleurs c’est plus que bienvenu (même si très sucré et que nous nous empressons de trouver une terrasse pour nous désaltérer à la bière !). On trouve des marchands ambulants de ce breuvage absolument partout. C’est une des boissons nationales du Chili. Avec le terrible Terremoto, dont je vous conterai ma rencontre… heu… demain ?
Je dis souvent qu’il y a de grandes similitudes entre ces deux grandes démocraties – oui moi aussi je m’étrangle en l’écrivant – entre ces deux grandes démocraties, donc, que sont le Chili et la France. Et le plus souvent pour le pire. Hyper centralisation étatique, négation des minorités culturelles et linguistiques, peu de diversité médiatique… démocrature. Démocrature, c’est rond en bouche et sonne plutôt bien à l’oreille. Un très joli néologisme pour un concept entendu de plusieurs amis chiliens. Je ne sais pas si la paternité leur incombe. En tout cas, c’est un terme que je fais mien bien volontiers. Démocrature. En gros, un régime qui laisse accroire à la souveraineté du peuple par l’accès que celui-ci a aux urnes mais dont l’expression de sa volonté ne lui sera pas accordée – rappelez-vous le référendum sur la constitution européenne. Je peux deviner l’origine du mot aux suites de la concertación, période qui a suivi le référendum qui a sorti le Chili du paradis de Pinochet/Kissinger/Friedman. C’était un moment important de discussion qui devait permettre de sortir en douceur du « défunt » régime pour aller vers une organisation sociale plus fidèle aux aspirations du peuple. Or, il s’avère que fondamentalement, les choses, d’un point de vue institutionnel et social, n’ont pas vraiment bougé. Les fortunes faites pendant et grâce à la dictature n’ont pas été redistribuées, la droite à un véritable droit de veto empêchant toute avancée sociale, amnistie générale des anciens tortionnaires (Pinochet sénateur à vie), le pays appartient littéralement à des multinationales et surtout, la constitution reste celle créée par Pinochet him-self (d’où le mouvement actuel pour une Assemblée Constituante). Avec les socialistes à la négociation, le changement c’était pas maintenant. Ni plus tard.
Non seulement il y a de grandes similitudes entre la France et le Chili mais en plus ces deux pays ont tendance à se rapprocher de la plus vile des manières. Il y a quelques jours deux informations se croisaient sans émouvoir ni a Santiago, ni à Paris. À Paris d’abord où une avocate chilienne a été arrêtée et enfermée à sa descente de l’avion à Roissy. Son tort, être une militante des droits de l’homme, en tournée en Europe avec un autre avocat, Rodrigo Román – que j’ai eu le plaisir de rencontrer l’année dernière, il était l’un des deux défenseurs de Daniel Melinao, ce mapuche accusé du meurtre d’un carabiniero(mais totalement innocenté après qu’il eut été prouvé lors du procès que ce bon paco s’était fait dessouder par un de ses camarades). Nos deux abogados sont sur le vieux continent pour parler des graves manquements aux libertés fondamentales qui sont toujours aussi fréquents au Chili. Cette chère María Ribera s’est vue jeter à la gueule son passé de militante. Il semblerait en effet que pour la police française qui l’a séquestrée, avoir été une ardente opposante à Pinochet soit une tache indélébile et rédhibitoire sur un CV. Étonnant, non ?
La deuxième affaire à lieu ici au Chili. Où une juge demande à la France l’extradition de Francisco Ismaël Peña Riveros. Sa faute? S’être échappé de la prison de Santiago en 1990. Ben oui, ce couillon s’est fait la malle (avec 49 autres couillus !) avant de terminer la peine que lui a infligée le régime après avoir obtenu ses aveux (sous la torture). Un sens civique en dessous de tout ! Et c’est pourquoi cette brave juge Claudia Pamela Salgado Rubilarréclame bien légitimement à la France de lui renvoyer par courrier postal ce contempteur du droit qui a quand même le statut de réfugié politique dans l’hexagone. Comme elle a bien comprit que la parole donnée n’a pas de valeur sous nos latitudes (cf Cesare Battisti) elle a bien raison de demander. On ne sait jamais ! Pour l’heure je ne sais pas quelle est la réponse de Hollande, je ne pense pas qu’il aille plus loin. Mais s’il venait à abonder dans le sens de la pasionarias des brebis égarées se serait à coup sûr un véritable séisme pour l’image internationale de la patrie des droits de l’homme (putain je m’y fait pas).
Tiens donc, en parlant de séisme, j’avais presque oublié. Comme avec ces histoires il commence à se faire tard, promis, demain je vous parlerai de ma rencontre avec le terrible Terremoto.
Pas d’inspiration pour illustrer le sujet. J’ai bien la photo de la juge mais elle a une vraie tête à claques. Ça gâcherait !
J’avais promis de parler de ma rencontre avec le terrible Terremoto, mais finalement j’ai plus envie. Faites pas chier, je vous dis que non. Pas envie, pas envie… Je suis contrarié. Plein de raisons à ça. Tout d’abord parce que je ne sais pas quand je pourrais mettre ce texte en ligne. Depuis ce matin (1er décembre) plus de connexion. Le truc con. Une saute de réseau. On ne sait pas quand se sera réparé. Décidément ce voyage commence bien niveau hautes technologies. En plus un jeune hobo de passage m’avait donné rendez-vous aujourd’hui, il devait simplement me donner l’heure et le lieu via facebook, lui venant par bus de Puerto Varas, bien plus au sud. Un hobo en bus. La blague. Steinbeck doit se retourner dans sa tombe. Mais bon, vu qu’ici y’a pas de train, les lignes régulières par la route font très bien l’affaire. Reste que voyager sur les essieux de ce genre d’engin est une autre paire de manche. Il pourrait se cacher dans les soutes, version clando, mais non. Monsieur a décidé de payer son billet. On croit rêver ! Bref. En bon clochard qu’il est quand même un peu, le camarade n’a pas de téléphone. Alors quand je me suis aperçu en me levant que nous n’avions pas de moyens de nous contacter, nous avons été obligés de courir en quête de cybercafé pour prévenir le routard (qui tourne au Lonely) que nous serions Pato et moi Plaza de Armas à une heure bien précise, vous n’en saurez pas plus, je ne vais pas vous dévoiler toute ma vie non plus.
À 15 heures donc, nous voilà à notre rendez-vous. L’homme est là qui mange un poulet en buvant une bonne grosse chopine de cerveza en terrasse du Marco Polo. Il nous propose de l’accompagner au Museo de los Artos Precolumbianos, à 3 pas d’ici. Nous y allons de bon cœur (non sans avoir avalé une bonne grosse chopine nous aussi) : fermé. Nous nous rendons donc à un deuxième musée national à 10 mn de marche. Le musée des Beaux Arts. Fermé lui aussi. Bien, nous prenons sur nous ce manque de chance. Mais on est des bonhomme (sic) après tout, et avec notre nouveau compagnon qui est chargé comme une mule, nous nous rendons à pied à la Montagne San Cristobal pour montrer à notre camarade d’une journée le plus beau panorama de Santiago. En marchant nous lui faisons l’article : montée en funiculaire, rafraîchissements à l’arrivée, vue imprenable, descente à patte dans la verdure et les chants d’oiseaux aussi divers que variés. En somme, un programme de rêve. Et là, Messieurs, Mesdames, est la principale raison de mon esprit chafouin du moment : fermé ! Point de funiculaire. Nous apprenons ainsi, par un gentil guide (privé) oeuvrant en bas de la montagne qu’ici, au Chili, tous les édifices culturels nationaux sont fermés le premier lundi de chaque mois. Ainsi donc, Mesdames, Messieurs nous avons été pris en otage par la fange socialo communiste, que le bon générale n’a pas réussi à éradiquer. Qu’ils soient maudits jusqu’à la trentième génération et qu’une armée de pestiférés leur éclate leurs pustules à la tronche. Nous qui venions en ami, montrer aux loqueteux que nous pouvions nous aussi nous intéresser à leurs sous-cultures. Je rappelle au passage qu’une sous-culture est quelque chose que Finkielkraut ne comprend pas, comme la bande dessinée par exemple. Alors que dire des « arts » dégénérés aux perspectives inexistantes et aux proportions douteuses… Ils devraient nous dire merci et nous accueillir en toutes circonstances. Mais non ! Fermé ! Ah les salauds d’égoïstes. J’en pleurerai presque, tant m’être fait rouler par la canaille m’empourpre façon couperose et m’emplie de honte tel le mec qu’a vraiment cru en 2012 que « le changement c’est maintenant ».
Dans cette histoire, j’ai quand même une bonne raison de sourire. Mon côté taquin certainement. En effet, pour le jeune Glenn (c’est le prénom de notre voyageur), il s’agissait de la deuxième visite de Santiago. La première eut lieu quelques semaines plus tôt, à son arrivée au Chili. Ayant du temps devant lui avant de prendre le bus qui devrait plus tard l’amener dans le sud du pays, décide de visiter un ou deux lieux importants de la capitale. Sauf qu’il atterrit sans le savoir… un jour férié !
Allez, que se vaya bien, camarade. Nos vemos en Francia. Et attention la prochaine fois que tu reviens chez les santiaginos. Prépare toi une occupation. Les bolcheviques ne travaillent pas les jours de séisme. À ce propos, demain, je vous conterai ma rencontre avec le terrible Terremoto.
Notre jeune clochard écoute les histoire de Tio Pato…
… et ça a l’air bien !
Comme notre camarade est bigoudeno-léonard (!!!)…
… on lui proposait une visite œcuménique à peu de frais.
On fait semblant d’être artiste…
En même temps j’ai rien à envier à ce qu’on peut voir dans la rue du Château…
Hier il a plu à Santiago. Toute la journée. Je sais que cette information vous émeut autant que si j’avais dit « un jour j’ai fait du vélo » mais ici, à cette période, c’est plutôt pas banal. Du coup on se croirait à Paris où les gens ne sortent pas et roulent comme des cons (pour changer). A Paname, pour ceux qui ont la chance de ne pas connaitre, dès qu’il y a de la flotte les blaireaux se plantent en bagnole avec une constance et une application qui forcent l’admiration. Bref. Tout ça pour dire qu’ici il a plus hier. Et que du coup ça a un peu gâché les festivités en cours. A savoir : le Teletón. Oui, comme chez nous le populo ne peut passer à côté de cette manifestation nationale. On en mange à toutes les sauces. Dans les journaux, à la télé, sur les taxis et les bus, dans les publicités… partout. Y’a même des réductions spéciales pour l’occasion. Je vois pas le rapport entre la lutte contre la vie chère et la lutte contre le handicap, mais c’est comme ça. Pato est persuadé que le Téléthon est né ici au Chili. Et qu’il s’est diffusé ensuite vers l’Amérique du nord avant de venir nous les briser en Europe. En même temps Pato est également persuadé que laOla est née l’année 1973 ou 1974 al Estadio Nacional de Santiago. Les 25.000 prisonniers de Pinochet, qui malgré de nombreuses séances de torture offertes par le nouveau régime s’évertuaient à se faire chier, pour passer le temps, auraient imaginé et fait comme si un match avait lieu devant eux. Leurs gestes de Ola devant servir à encourager les deux équipes invisibles en compétition sur le terrain. Par la suite, un des prisonniers devenu plus tard entraineur d’une équipe nationale l’aurait popularisé lors de la coupe du monde de Mexico en 1986. Je ne sais pas si c’est vrai – Pato a vécu la chose en direct – mais je trouve l’histoire plutôt chouette. La FIFA et le CIO étant tenus par d’anciens franquistes, fascistes et autres amis des libertés fondamentales, que ce mouvement de foule qu’on voit surtout dans les stades (je l’ai vu de mes propres yeux au concert de… One Direction, voir article précédent) ait été initié par des anti-Pinochet est assez jouissif. Mais revenons à nos moutons, ou plutôt à nos handicapés. Et surtout à cette grande fête du don de soi et de ses sous, vu qu’ici comme ailleurs, l’état préfère financer une armée inutile et dangereuse, des projets débiles et soutenir les plus riches de ses citoyens au détriment des plus démunis au lieu d’investir dans la recherche et la santé. Et bien je vous le dis tout de go, il est urgent que la recherche n’avance pas trop vite. Parce qu’ici, on ne s’emmerde pas comme en France. Ici on sait attirer le chaland. En commençant par le plaisir des yeux! Je ne parle pas de ces pauvres bougres en fauteuil au premier rang mais de ce qui se passe sur scène. C’est une débauche de culs, de seins, de gambettes à redonner le goût de l’onanisme à Farinelli (ou à Lord Varys pour les moins cultivés et/ou mélomanes d’entre vous). Des corps superbes offerts aux téléspectateurs, une farandole de dessous chics, sans oublier la version masculine avec son concours Mister Teletón ! Et ses salauds d’handicapés qui ne pensent qu’à guérir et nous priver de tels spectacles? Heureusement, hier il a plu à Santiago. Du coup le grand concert prévu avec un parterre de célébrités, de chanteur(euse)s (qui sont à la scène chilienne ce que sont les participants à la soirée des Enfoirés, une nuisance sonore) le concert, donc, a été annulé, faisant perdre un peu d’argent pour la recherche. Jajaja (l’homme civilisé rie en faisant Hahaha mais ici ils font Jajaja, n’importe quoi). Alors les handicapés égoïstes qui pensent qu’à leurs jambes, on rigole moins d’un coup, non?
Bien, demain je vous parle de ma rencontre avec le tord boyaux local : le terrible Terremoto.
Y’a quand même des concerts qui déboitent dans le coin !
Les ados : ces êtres étranges venus d’une autre planète. Leur destination : « prrrt ‘tain ch’sais pas ». Leur but : « lâche moi, j’ai trop pas le temps d’y réfléchir à tes trucs de vieux. Hein hein lol». Je les ai vus. Pour moi, tout a commencé par une journée ensoleillée, lors d’un repas de famille, alors que je vidai mon troisième Jack. Cela a commencé par une maison par trop accueillante et par un homme devenu trop saoul pour garder sa raison. Cela a commencé par une question venue d’une autre galaxie à laquelle j’ai répondu positivement. Maintenant, je sais que les ados sont là, qu’ils ont pris forme humaine et qu’il me faut convaincre un monde incrédule que le cauchemar a déjà commencé…
Prologue :
Je préviens de suite. Le premier GI qui vient me briser les noix avec son « jour le plus long », je le renvoie direct dans son service gériatrie qu’il n’aurait jamais dû quitter. Putain mais il fait quoi le personnel médicale à laisser dehors papy Saute sur Sainte-Mère-l’Eglise ? Le D Day ce n’était pas le 6 juin 44 ou le 21 juin de chaque année. Le jour le plus long c’était ce 20 juin 2014 !
Logue (celle-là je l’ai piquée à Maëster. Remerciements éternels) :
On arrive bientôt à Paname. Primordial à fond dans la voiture. Un peu de Zebda, un album de remix électros des Béruriers Noirs, et même un peu de Caravane Passe… Je me nettoie les esgourdes avec tout ce qui est à ma portée comme un jeune acteur de porno gay se purifie les parois du rectum avant sa première scène anale. Ce soir sera comme un dépucelage. Avec tout ce que cela véhicule d’appréhension. Et d’excitation. Ce soir, plus rien ne sera comme avant… Ce soir je vais voir sur scène les descendants de Philip des 2 be 3. D’où cette métaphore pornographique qui n’est pas sans fondement.
Un peu plus tôt, les 3 ados, de sexe féminin, à en croire les protubérances mammaires et une fâcheuse tendance à parler maquillage et autres « trucs de filles tu peux pas comprendre… », les 3 ados donc, montent dans la voiture. A l’instar des visiteurs de David Vincent que l’on pouvait reconnaître grâce à leur petit doigt toujours tendu, on reconnaît une ado moderne à la greffe de portable dans la main gauche. Tu peux y aller à tirer dessus, ça bouge pas. Il ne faut pas 200 mètres pour que les 2 hominidés de derrière se servent de leur implant pour écouter leur musique au casque. Mode autiste. La plus grande à côté de moi ne le fait pas de suite mais ça ne saurait tarder. Je sens que les 4 heures de route qui nous mènent jusqu’à la capitale de la France – nommée ce soir Biactole City – risquent d’être très, très longues.
L’ado est ainsi fait qu’il est amorphe, apathique… Un côté mollusque décérébré mais qui se met à mordre dès que l’on touche à ses idoles ou à sa pizza. L’ado n’a qu’une obsession, avoir 18 ans pour avoir le droit de t’envoyer chier. Parce que « les parents c’est tous des connards ok ? ». On peut penser que les plus grands films de zombies s’inspirent directement de l’observation de ce danger lattant et omniprésent dont l’adulte semble refuser d’admettre la gravité. Merci à George A. Romero et Edgar Wright de nous avoir ouvert les yeux.
Mes 3 ados semblent s’éveiller, sortir de leur léthargie, à l’approche du périphérique. Chaque panneau « Paris » les comble d’aise. Je dis mes 3 ados mais elles semblent ne faire qu’une créature. Comme pour une équipe de foot y’a un esprit pour le groupe. Les 3 filles qui se nomment A… Z… et M… rigolent au même moment, se rendorment aux mêmes endroits… l’entité AZM (respire) ne parle pas mais il semble y avoir un moyen de communication à base de petits cris et de sautillements. Il faudrait les lumières d’un très grand éthologue pour percer le secret de ces comportements simiesques.
Je passe l’arrivée dans cette ville que les allemands n’ont même pas eu le courage ou le bon goût de raser, 1 heure ½ de bouchon, travaux sur la ligne B du RER… la fête.
Nous finissons par déboucher non loin de notre but : le Stade de France. Des hordes d’ados pré pubères s’y rendent depuis le début de l’après-midi. Chacun – chacune plutôt, tant la population présente est massivement féminine – arbore un sourire de contentement à te glacer les sangs. Ils savent ce que je vais endurer. Et ils savent que ce qui va se passer est hors de ma compréhension. A moi et aux rares adultes suffisamment fous ou inconscients pour s’approcher de ce temple qui s’érige devant nous et qui nous est des plus hostiles. Nous sommes ici chez eux. Ce petit bout de territoire ne nous appartient plus, à nous les êtres dotés de raison. Et ces boums boums incessants qui sortent des murs du monument. Et toujours ces choses qui avancent mécaniquement vers les portes d’entrées, portable greffé à la main gauche…
Nous entrons…
La dernière fois que j’ai mis les pieds dans une boite de nuit, et ben ça remonte à presque 17 ans. Et la dernière fois que je l’ai fait sobre, et ben je ne sais même pas si c’est déjà arrivé. Je n’ai pas de télé et les seules radios que j’écoute sont France Inter et RFI. Autant dire que je n’étais absolument pas préparé à me prendre de pleine face 1 heure trente de clips sponsorisés par Skyrock. 1 heure trente de tubes totalement inconnus de moi mais que le public en délire acclame en hurlant et en se déhanchant comme sur un dansflore. Et ben 1 heure trente de ça, c’est très, très long !En plus je suis désormais seul car AZM a déjà disparue, cherchant à se placer au plus près de la scène. Je reste au fonds avec les autres parents/grands-parents/accompagnateurs… Les vieux quoi.
Et puis la première partie commence. 5 SOS. Rien à voir avec un cri de détresse légitime à voir l’allure de ces 4 australiens au charisme de bulot. 5 SOS comme 5 Seconds of Summer. Que c’est beau ! Mais que c’est chiant. Le guitariste arbore une coiffure verte, en pétard, se prend pour un punk mais chante du Jonas Brother… Et ces 4 jeunes hommes d’essayer de maitriser la scène. Scène gigantesque avec 2 rampes de skate d’une quinzaine de mètres de chaque côté, une passerelle au centre et terminée par une autre petite scène au milieu du public. Ils ne sont pas ridicules mais simplement la scène a été taillée trop grand pour ces jeunes puceaux.
Fin du show sur leur tube qu’on a déjà vu sur les écrans 8/10 fois (ça c’est du marketing brutale) et re 45 minutes de clips. Dont encore du 5 SOS.
Après une macarena géante (tout le stade danse sur ce truc, j’ai peur) et beaucoup de retard, les gourous du jour arrivent enfin. Les One Direction, One D pour les intimes. Hystérie collective, hurlements, pleurs, c’est la folie. Juste pour voir j’enlève mes bouchons d’oreille. Erreur ! Même au Hellfest je n’ai pas connu un bruit aussi flippant. Hyper aiguë. C’est comme des petites fléchettes sur mes tympans.
Pour ceux, nombreux, qui ont la chance de ne pas les connaître, One D c’est un boys band brito-irlandais issu de la téléréalité. 4 ans plus tard ils remplissent des stades partout dans le monde. Et ici à Paname City ils en font même 2. Complets les deux. Une semaine après d’autres zombies plus connus, les Stones.
Bon je passe le concert, pyrotechnies, jeux de lumière, vidéos… J’arrête de compter les évacuations sanitaires. Plein de jeunes filles en fleur dans les vapes à la vue de leurs idoles. C’est beau comme un concert de Tokyo Hôtel.
Moment de grâce où 60.000 spectatrices déploient en même temps, sur le dernier tube du band, une petite feuille A4 avec le même cœur bleu blanc rouge dans lequel est écrit We and Us. Je fais une crise de diabète à la vue de tout ce miel. C’est tellement sirupeux que j’exsude du sucre liquide par tous les pores de ma peau. Je suis confit. Et ce n’est pas la seule bière à 7 euros que je me suis offerte qui en est la cause.
Après ce très, très long moment AZM me rejoint exactement où elle m’avait laissé. Nous sortons prendre notre RER. Et toujours ces sourires de contentement partout autour de nous. Démoniaque !!!
– T’as vu ? Il a changé de coiffure.
– Ouai je l’ai capté de suite. Ça lui va trop bien !
C’est accompagnés de ce genre de dialogue que nous traversons Paris pour retrouver notre voiture. 200 mètres après avoir quitté notre parking AZ derrière a déjà son casque sur les oreilles bientôt suivie par M à l’avant.
Plus nous nous éloignons de Paris et plus les 3 ados s’enfoncent dans une sorte de léthargie qui n’est pas sans rappeler l’hibernation de la marmotte de Sibérie… Les 4 heures de route pour Dinan, de nuit, vont être très, très longues…
Et puis logue :
On arrive bientôt à Dinan. Primordial à fond dans la voiture. Un peu de Zebda, un album de remix électros des Béruriers Noirs, et même un peu de Caravane Passe… Je me nettoie les esgourdes avec tout ce qui est à ma portée comme un jeune acteur de porno gay se purifie les parois du rectum après sa première scène anale. Ce soir a été comme un dépucelage. Avec tout ce que cela véhicule d’appréhension. Et d’excitation. Désormais, plus rien ne sera comme avant… Ce soir j’ai vu sur scène les descendants de Philip des 2 be 3. Et ça fait (presque) pas mal au fondement !
Hordes d’ado pré-pubères à l’assaut du Stade de France
en me baladant sur les sites de mes nouveaux amis, je suis tombé sur cet article dont je vous propose une traduction ci-dessous. l’abus d’alcool est dangereux mais apparemment certains plus que d’autres…
Compte rendu de « Le secret de la chauve-souris : Bacardi entre rhum et révolution »
Un documentaire récompensé à New York révèle le lien entre Bacardi et le terrorisme contre Cuba. Un documentaire qui montre les relations de la société Bacardi avec le gouvernement américain et ses services de sécurité pour attaquer Cuba, ainsi que le soutien financier aux organisations et aux individus afin qu’il fasse du terrorisme contre la nation des Caraïbes.
Le documentaire « The Secret Of The Bat : Bacardi Between Rum And Revolution » (Le secret de la chauve-souris. Bacardi, entre rhum et révolution) a reçu la médaille de bronze au Festival de New York. Le documentaire est basé sur le livre du journaliste colombien résident en France Hernando Calvo Ospina : « Ron Bacardi: La guerra oculta » (Rhum Bacardi : CIA, Cuba et Mondialisation) et réalisé par les Allemands Eckehard Sieker et Marcel Kolvenbach. Ce documentaire montre les relations directes du gouvernement américain, de la CIA, de la contre-révolution cubaine avec les terroristes qui ont attaqué Cuba depuis 40 ans et la participation de la transnationale du rhum Bacardi dans toutes ces activités.
Depuis près d’un siècle, la compagnie Bacardi a fondé un empire du rhum à Santiago de Cuba. La canne à sucre cultivée à Cuba fourni l’essentiel de la matière première – alcool et miel – pour la distillation et la production des liqueurs de la meilleure qualité. Mais l’autre partie des activités du clan Bacardi a été l’engagement avec les politiques cubains corrompus des années 1950 et avec le régime dont la nation porte le deuil de 20 000 cubains qu’il a tué. Pour cette raison, les propriétaires de Bacardi ont fui avec que les dirigeants de la tyrannie en 1959, en enlevant la marque et tous droits à Cuba.
Havana Club, marque de rhum cubain détenue par la famille Arrechavala, produites dans l’ouest du pays et concurrent traditionnel de Bacardi, a assumé le leadership international et la personnalité du rhum cubain, le meilleur dans le monde, se relevant de la ruine et de l’abandon dans lequel l’ont laissé ses anciens propriétaires et du harcèlement et les barrages que la société – aujourd’hui Bacardi Martini – avait tendance a créer dans toutes les régions du globe afin d’imposer sa qualité sur un marché mondial plus exigeant.
Le décollage nécessaire de Havana Clubavait besoin de financement, de technologies et d’expériences pour la conquête des marchés, ce qui vint grâce à la société française Pernod-Ricard. La croissance des ventes, le placement de Bacardi sur les marchés, ses tentatives de s’emparer de la marque, l’engagement de l’administration de la société avec la droite conservatrice américaine et la mafia anti-cubaine, ses contributions financières considérables aux campagnes républicaines en Floride, sa participation à la gestion de la loi Helms-Burton a entraîné cette histoire de blocus.
Campagne internationale de boycott de Bacardi
Rock Around the Blockade a lancé le 13 juin 1998 la campagne Bacardi, « Une mauvaise boisson », avec l’objectif que les consommateurs britanniques arrêtent de consommer cette marque de rhum. La campagne a rapidement eu des répercussions internationales, en étant soutenu par une multitude d’associations, de collectifs et d’ONG(comme Sodepaz) dans le monde entier.
Les principales raisons que mettent en avant les promoteurs de la campagne sont :
* La responsabilité de Bacardi dans le blocus des Etats-Unis contre Cuba : les avocats de Bacardi ont aidé à la rédaction de la loi Helms-Burton, qui durcit encore plus le blocus de l’île. Cette loi est en violation du droit international, donc chaque année elle est condamnée à l’ONU. L’influence de Bacardi sur la formulation définitive de cette loi est telle que le sénateur William Dengue déclare qu’elle devrait être renommée loi Helms-Bacardi.
* La violation des normes internationales sur le droit de propriété intellectuelle, les marques et les brevets : Bacardi a enregistré et commercialisé aux États-Unis plusieurs marques de rhums cubains comme Havana Club ou rhum Mathusalem. Le gouvernement américain a permis ce fait effectuant un changement de législation ad hoc, étant par conséquent condamné par l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
* Vente d’un d‘un rhum dit cubainqui n’a aucun composant de Cuba : toutes les publicités pour les produits Bacardi font constamment références à Cuba, comme leur slogan aux États-Unis, « Découvrez le goût de la vieille Havane ». En réalité les produit Bacardi sont produits à Porto Rico.
Notez que, en Espagne, la campagne a connu son plus grand essor l’été de l’année 2003. Ceci quand la société Sintel a été vendu à Jorge Mas Canosa, lié au Bacardi, qui déclara la fermeture de l’entreprise, avec 1 200 licenciements, ce qui déclencha l’une des plus spectaculaires manifestations de travailleurs de la démocratie, maintenant 1 000 travailleurs campant sur le Paseo de la Castellana à Madrid pendant 8 mois.
La campagne de boycott de Bacardi a servi de base pour le livre « Ron Bacardí: la guerra oculta » (Rhum Bacardi : la guerre cachée), de l’écrivain colombien Hernando Calvo Ospina et pour le film documentaire « El secreto del murciélago y Bacardí, entre ron y revolución » (le secret de la chauve-souris et Bacardi, rhum et la révolution), des Allemands Eckehard Sieker et Mercel Kolvenbach.
On serait bien couillon de se limiter !
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