Nous avons la chance d’être hébergés par Angelica et sa famille dans les hauteurs de Valparaiso pour le nouvel an. Et autant dire que nous lui en sommes reconnaissant tant il est difficile de trouver un hostal bon marché en cette période. Le nouvel an à Valpo (quand on est dans le coup on dit Valpo, d’autres disent Courche ou Valto, mais eux je les méprise par principe) est une institution. Au moins 1 million de personnes dans les rues ! Et un feu d’artifice de déglingo. En fait c’est 4 ou 5 feux coordonnés sur plusieurs communes de la baie de Valparaiso que l’on peut voir de chez Angelica. Viña del Mar, Concón… Toutes ces villes balnéaires brillent en même temps. Rien à voir avec les pétards à mèche de l’autoproclamée plus belle ville du monde. Et nous sommes d’autant plus reconnaissant qu’Angelica ne nous connait ni d’Eve ni d’Adam. Simplement, elle est une ex pressa et qu’elle connait parfaitement le sens du mot camaraderie. Je pense qu’à part les militants du Parti Socialiste tout le monde connait le mot « camaraderie », je ne vais donc pas l’expliquer ici, mais ils peuvent me le demander par courrier postal ou par télégraphe, je reste à leur disposition.
Nous arrivons donc la veille pour prendre nos quartiers, Pato, son amie Claudia, Myriam qui nous suit dans cette nouvelle aventure et Thomas le viking au teint d’albâtre et aux cheveux… d’une certaine couleur. Pour copier de manière éhontée
Vincent Malone, je dirais que c’est un Viking aux cheveux de sa couleur. Je suis désolé de ce passage fort ennuyeux sur la couleur des tifs du camarade mais dans une précédente chronique, par mégarde ou par malveillance, je ne sais plus, j’ai dit du
Gorillon de Paris qu’il était, comment dire, qu’il était roux ! Et sa maman qui n’a évidemment pas apprécié de voir écrit ce qu’elle n’ose s’avouer – on a autant envie de savoir que son fils est roux que d’apprendre qu’il est fan de Jean-François Copé ou qu’il désire être curé chez les enfants de troupe – sa mère donc à placé un contrat sur mon charmant minois. L’hexagone au sud de Lyon m’est interdit, ainsi qu’une partie un peu paumée de la France dont j’ai découvert avec stupéfaction qu’elle était proche de la Bretagne, la Normandie. Je n’ai pas plus envie d’aller à Cannes qu’au Havre mais on ne sait jamais, un accident étant vite arrivé, je demande solennellement pardon, je ferai acte de contrition et je ne dirai plus que mon camarade à la peau de lait mais au visage rougi par le soleil est un rouquin. Je le penserai fortement mais cela, Madame, vous ne pourrez me l’empêcher, j’ai ma liberté de penser !
Merci !
Et puisque l’on parle rouquins, parlons anglais. Oui les anglais. Pas ceux qui vont débarquer mais les autres, les citoyens de sa gracieuse majesté. Parce que dans le port de Valparaiso, où il y a également des marins qui chantent, on peut apercevoir deux ou trois bâtiment militaires de la glorieuse flotte Chilienne. Ces fabuleux vaisseaux ont été achetés aux Royaume-Unis, vous savez ce pays autrefois puissant mais qui depuis une certaine dame de fer est resté bloqué – un lumbago sans doute – la bouche ouverte – une crampe à coup sûr – sous le bureau de l’oncle Sam. Et bien figurez-vous que Madame de Fer avait une amitié particulière avec le Grandissime Pinochet. Un même gourou charismatique, prix Nobel d’économie,
Milton Friedman, attisait entre eux le feu de la passion ultralibérale et les poussait légitimement à craindre, donc à combattre, la fange ouvrière qui détruisait les fondements de leurs pays respectifs. Il arriva un drame dans leur si belle idylle. Les gauchis’ ont viré Augusto du pouvoir qu’il avait gagné à la seule force de son travail et d’une armée gagnée à ses idéaux de stupre et d’ordre. En effet, lors d’un voyage en Grande Bretagne, un juge malveillant – ne serait-ce pas un pléonasme ? – demanda à coup de mandat d’arrêt international l’arrestation et l’extradition de ce saint homme vers l’Espagne, arguant du fait que le généralissime « aurait », on met bien les guillemets, « aurait » fait exécuter des citoyens espagnols. Quelle honte que de s’acharner sur un pauvre petit vieux !
On connait une partie de la suite. Il fut placé en résidence surveillée, Thatcher a gueulé, la famille d’Augusto a présenté Pinochet comme un vieillard malade et en fin de vie, ne pouvant se déplacer qu’en fauteuil roulant. On se remémore avec joie qu’au bout de plusieurs jours, semaines, de joutes judiciaires, le grabataire a eu le droit, venu directement de Downing Street, de rentrer mourir chez lui au Chili, entouré de sa famille. On se rappelle avec émotion comment il s’est levé de son fauteuil dès l’arrivée sur le tarmac de Santiago et comment il a commencé à marcher d’un pas alerte, l’œil vif et le poil soyeux, l’air de dire, face aux caméras du monde entier : je vous ai bien niqué !
Ce que beaucoup ignorent, les chiliens les premiers, c’est que rien ne s’est joué dans cette affaire sur le plan judiciaire, hélas pour le juge espagnol qui a vraiment travaillé dur dans cette histoire. Non, le niveau de négociation était directement à la tête des états chiliens et de la plus que bien nommée dans ce cas Perfide Albion. La présidence chilienne a obtenu de récupérer Pinochet en s’engageant à acheter quelques vaisseaux de la flotte royale dont Londres voulait se débarrasser. Le Général ne sera jamais jugé pour que le trésor britannique puisse se renflouer. Les chiliens n’auront jamais accès à la justice parce que tous les gouvernements successifs, de droite comme de gauche, ont toujours préservé, avec un acharnement qui force le respect, l’impunité des putschistes.
Et bonne année quand même !
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Bon outre que ma lentille est dégueulasse, je tiens à souligner pour les blaireaux du fonds que le bateau au premier plan ne FAIT PAS partie de la transaction. |